Par où transite l’uranium et ses produits de désintégration et comment ils nous nuisent
(This is a republication, in French, for our French-speaking readers, of our original article, The Uranium Map in our Bodies.)
Traduction par Sortir du Nucléaire Paris
L’uranium est radioactif. Depuis plus d’un siècle, les humains extraient de l’uranium dans le monde entier, que ce soit pour vernir les poteries ou pour la production de bombes atomiques. Alors que l’impact de l’uranium et de ses produits de désintégration sur la santé on été initialement inconnus, au moment de la constitution de l’arsenal atomique de la guerre froide, des effets évidents sur la santé ( le cancer du poumon, par exemple, étaient devenus associés aux mines d’uranium dès les années 1930) ils ont été ignorés pour favoriser la production d’ogives nucléaires. Les mines et les usines de concentration d’uranium se sont répandues aux États-Unis.
Dans l’ouest des États-Unis, comme dans la plupart des pays du monde, les mineurs et les personnes vivant à proximité de ces installations étaient en grande partie autochtones. Non seulement la santé des travailleurs a été impactée, mais les processus industriels de l’uranium ont laissé une contamination radioactive dans le sol et dans l’eau, les habitants de la région ont également subi des effets néfastes sur la santé. L’uranium et ses produits de désintégration jonchent encore ces paysages, posant un danger permanent, en particulier lorsqu’ils sont inhalés ou ingérés. Bien que ces radio-isotopes soient naturels, ils sont artificiellement présents en raison de leur traitement industriel. Bien que l’extraction de l’uranium soit la source la plus évidente, l’or et d’autres procédés miniers peuvent également libérer ces matériaux. Les sites miniers et les zones environnantes constituent le plus grand danger d’exposition à l’uranium et à tous ses produits de désintégration.
Parmi les autres sites susceptibles de présenter un danger par les produits de désintégration, on peut citer les sites d’élimination des déchets de thorium et les usines qui utilisaient de la peinture au radium pour des produits de consommation, et militaires tels que les cadrans de montres et d’avions. Ces sites parsèment le paysage nord-américain et, bien qu’un certain nombre de ces installations aient été nettoyées dans le cadre du programme Superfund, pour certaines, la surveillance est en cours. Le radon peut lixivier du sol dans de nombreux endroits, pas seulement des mines, et se retrouver piégé dans des bâtiments. Dans ce cas, toutefois, le radon peut être éliminé facilement et en toute sécurité grâce à une technologie simple, recommandée par la US Environmental Protection Agency (EPA), qui ne présente pratiquement aucun danger.
Bien que toutes les personnes exposées soient à risque, les radiations représentent un danger particulier pour les femmes, les enfants et les grossesses. La grossesse est une préoccupation singulière, car les impacts ne sont pas pris en compte dans les normes actuelles d’exposition aux radiations. L’uranium se désintègre en un certain nombre d’isotopes radioactifs. Dans cet article, nous examinons l’impact de l’uranium et de cinq de ses produits de désintégration les plus nocifs pour la santé: le thorium, le radium, le radon, le polonium et le plomb radioactif. Nous examinons où ils transitent dans le corps humain, en utilisant des images représentant la grossesse. Bien que l’EPA dispose de certaines normes d’exposition pour ces isotopes, elle n’a pas classé le radium, le radon ou l’uranium pour leur cancérogénicité.
L’URANIUM imite* le calcium minéral et peut pénétrer dans votre corps par inhalation ou par ingestion. Le remplacement du calcium sain non radioactif par de l’uranium radioactif peut entraîner de nombreux effets sur la santé, malins et non malins. Il existe également des preuves que l’élément uranium imite l’œstrogène, une hormone essentielle. Si vous inhalez de l’uranium dans les poumons, cela peut prendre des années pour qu’il quitte les poumons et soit absorbé par le reste de votre corps. Quand il sort du poumon, il se loge principalement dans les os, parfois vers les reins et le foie. L’uranium ingéré se retrouvera dans les mêmes organes et tissus, mais peut être absorbé plus rapidement dans le tractus gastro-intestinal néonatal. Le jeûne et les carences en fer augmenteront les taux d’absorption de l’uranium.
Dans le corps, l’uranium peut causer des dommages aux reins, des maladies des os et des problèmes de développement. La recherche indique que même à des niveaux inférieurs aux limites autorisées par l’EPA dans l’eau, l’uranium peut avoir des impacts négatifs sur la santé de la reproduction, notamment une baisse de la fertilité, une diminution de la testostérone, une diminution du poids corporel et de croissance, une insuffisance ovarienne et une diminution du placenta. L’incidence du cancer des gonades au Nouveau-Mexique est huit fois plus élevée chez les enfants et les adolescents amérindiens que chez les personnes non amérindiennes.
Le THORIUM inhalé ou ingéré, s’accumule aux mêmes endroits du corps. Le thorium imite le fer, minéral nécessaire à la santé des os et du sang. Les organes cibles comprennent les poumons, les ganglions lymphatiques, les os, le foie et la rate.
À des doses plus élevées en médecine et en milieu professionnel, le thorium est associé au cancer du poumon, au cancer du pancréas, au cancer colorectal, aux maladies respiratoires chroniques et aux lésions du foie.
Les résidents à proximité d’un site d’élimination des déchets de thorium, dans le New Jersey, présentent une augmentation des anomalies congénitales et des maladies du foie, bien que des tests spécifiques de contamination corporelle n’aient pas encore été réalisés.
Même de petites quantités de thorium dans le placenta augmentent son poids.
Le RADIUM, comme l’uranium, imite l’indispensable calcium minéral et traverse le placenta dans les mêmes proportions que dans le sang de la mère.
En raison de sa similitude avec le calcium, le radium ingéré se loge dans les os, provoquant des changements rapides de la structure osseuse, la formation de globules rouges (hématopoïèse) pouvant provoquer des sarcomes osseux. En brûlant des combustibles fossiles, nous pouvons inhaler du radium dans les poumons. De là, il entre progressivement dans la circulation sanguine. L’exposition chronique au radium chez l’homme par inhalation a entraîné une diminution du nombre de globules blancs (leucopénie aiguë). L’exposition orale entraîne de l’anémie, une nécrose de la mâchoire, un abcès du cerveau et une bronchopneumonie terminale. Aucune information n’est disponible sur les effets du radium sur le développement ou la reproduction chez l’homme ou l’animal.
Le RADON est un gaz radioactif qui, en soi, ne s’accumule pas dans les organes, contrairement à ses produits de désintégration. Lorsqu’il est inhalé, la dose de radon est administrée principalement aux poumons. Le radon peut se rendre au cerveau où ses produits de désintégration peuvent irradier les tissus cérébraux. Il peut traverser le placenta en irradiant l’embryon ou le fœtus en développement.
On estime que le radon est la deuxième cause majeure de cancer du poumon après le tabagisme, responsable de 15 000 à 22 000 décès par cancer chaque année rien qu’aux États-Unis.
Lorsque le radon transite vers le cerveau, ses produits de désintégration peuvent causer la maladie d’Alzheimer et la maladie de Parkinson. Certaines recherches indiquent que le radon provoque la sclérose en plaques. L’exposition chronique a ses effets sur les voies respiratoires, engendre notamment des maladies pulmonaires chroniques, des pneumonies, des fibroses pulmonaires et des diminutions de la fonction pulmonaire.
Le radon peut traverser le placenta et se rendre dans l’embryon en développement, où ses produits de désintégration peuvent produire des lésions à l’ADN susceptibles de le tuer. Si la grossesse est au stade fœtal, le radon et ses produits de désintégration seront attirés par les lipides, où ils ne tueront probablement pas le fœtus, mais pourraient avoir de graves conséquences sur le développement du cerveau.
Le voyage du POLONIUM au sein de notre corps a fait l’objet de nombreuses études mais, malgré cela, nous ne savons toujours pas comment interpréter les données correctement pour diverses raisons. Une grande partie des recherches biologiques et toxicologiques importantes sur le polonium ont plus de quarante ans.
Le polonium peut être inhalé et ingéré et s’accumule dans le foie, les reins, la moelle osseuse et les gonades, en particulier les ovaires radiosensibles. Le polonium s’accumule également dans le sac vitellin de l’embryon et dans les tissus foetaux et placentaires.
Le polonium est toxique en raison de sa radioactivité plutôt que par ses propriétés chimiques. Une faible exposition au polonium peut avoir des effets biologiques malins et à long terme en raison de son affinité avec les tissus reproducteurs, embryonnaires et fœtaux. Le polonium peut endommager le placenta. On sait très peu de choses sur les effets de l’exposition au polonium sur l’embryon et le fœtus, mais cette exposition pourrait entraîner des pertes de fertilité et des fausses couches.
Le PLOMB radioactif peut causer des dommages à la fois par ses propriétés radioactives et chimiques. La majorité du plomb s’accumule dans les os et les dents. Le reste s’accumule dans tous les organes du corps. Le plomb s’accumule dans le placenta et se retrouve dans l’embryon ou le fœtus en développement.
Une exposition élevée au plomb peut entraîner une intoxication. Les symptômes comprennent des douleurs abdominales, de la constipation, de la fatigue, des maux de tête, de l’irritabilité, de la perte d’appétit, de la perte de mémoire, des douleurs ou des picotements dans les mains ou les pieds et un affaiblissement général.
Parmi les symptômes de l’exposition chronique au plomb, notons les fausses couches, les décès à la naissance, l’infertilité masculine et féminine, les troubles du comportement, les dommages au système nerveux, l’intelligence réduite, les effets neurologiques, les retards mentaux, l’hypertension artérielle, les maladies cardiaques, rénales et les cancers. Pour le plomb radioactif, le risque de cancer augmente par rapport au plomb non radioactif, mais les risques de maladies d’origine chimique demeurent.
* On parle aussi de leurre chimique, car c’est la couche électronique externe qui lui donne les mêmes propriétès d’assimilation que le calcium.
Texte original de Cindy Folkers paru dans Beyond Nuclear International le 17 février 2019. Traduction par Sortir du nucléaire Paris le 11 juin 2019. Téléchargez cet article avec les citations et les notes de fin ici.
Nous aimerions louer et remercier le « Radiation Monitoring Project » (Projet de surveillance des radiations par les images) pour cet article. RMP anime des ateliers sur la compréhension et la surveillance de la contamination radioactive dans l’environnement en achetant et en distribuant des détecteurs de rayonnement aux communautés contaminées et les plus exposées aux États-Unis. RMP est une collaboration entre Diné No Nukes, Nuclear Energy Information Service et Sloths Against Nuclear State.
Tout les dessins d’illustration ont été fournis avec l’aimable autorisation de « Radiation Monitoring Project »et sont protégés par les droits d’auteur.
Photo titre par holsoyvivian à Creative Commons.